Les futurs prix de l’électricité nucléaire produite par EDF se sont de nouveau invités en fin de semaine dans la bataille du budget. Vendredi, à l’issue des débats de la commission mixte paritaire (CMP), le député RN Jean-Philippe Tanguy a menacé de censurer le gouvernement Bayrou s’il ne retirait pas l’article 4 du projet de loi. Cette disposition pourrait provoquer un « quasi-doublement » du prix de l’électricité issue du nucléaire, ce qui « pèserait sur les ménages » et aggraverait « la vague de désindustrialisation qui a déjà commencé », a affirmé le député.
Il a fait savoir que son groupe déciderait lundi de son vote sur la version finale du projet de budget et de sa position sur la censure. Le gouvernement peut toujours procéder à d’ultimes arbitrages d’ici à lundi et amender le texte, mais le ministre des Finances Éric Lombard a promis vendredi matin que le gouvernement « respecter(ait) le texte » issu de la CMP.
Une nouvelle fois, le gouvernement est mis sous la pression du RN sur la délicate question du prix de l’électricité, sujet phare du parti qui a fait du pouvoir d’achat l’un de ses totems. Car, pour rappel, fin novembre, Michel Barnier avait tenté d’éviter la censure de son gouvernement en renonçant à une hausse supplémentaire des taxes sur l’électricité dans le budget.
Réforme de la rémunération d’EDF
Très technique, l’article 4 réforme la rémunération d’EDF pour sa production nucléaire, en remplacement du mécanisme de régulation actuel qui s’éteint le 31 décembre 2025.
En vigueur depuis environ 15 ans, ce mécanisme appelé Arenh (Accès régulé à l’électricité nucléaire historique), largement décrié par EDF, obligeait le fournisseur historique à vendre environ un quart de son électricité nucléaire au prix cassé de 42 euros le mégawattheure (MWh) aux industriels gros consommateurs d’électricité mais aussi à des fournisseurs alternatifs. In fine, le consommateur bénéficiait de cette « part » d’Arenh.
Pour le remplacer, un nouveau mécanisme de régulation a été prévu et traduit dans l’article 4 de ce projet de budget. Il découle de l’accord entre EDF et l’État annoncé en novembre 2023, qui a défini un prix de l’électricité d’environ 70 euros le MWh en moyenne sur 15 ans, ce qui avait été accueilli froidement par représentants de consommateurs et d’industriels.
Amortir les hausses de prix
En vertu de cet accord, EDF peut vendre toute son électricité sur les marchés. En contrepartie, au-delà de certains seuils de prix, l’article 4 prévoit qu’une fraction des revenus supplémentaires engrangés par EDF sera prélevée et affectée à un mécanisme de redistribution pour tous les consommateurs, particuliers ou industriels, clients ou non d’EDF. Concrètement, entre 78 euros et 110 euros le MWh, une fraction de 50 % des revenus supplémentaires d’EDF serait prélevée, et au-delà de 110 euros le MWh, ce serait 90 %.
« Ce mécanisme permet d’amortir les hausses de prix pour les consommateurs, en imposant à EDF une redistribution de ses marges quand les prix sont élevés. Il a été conçu pour prendre la suite de l’Arenh, qui s’éteindra au 1er janvier 2026, et tirer les leçons de la crise énergétique de 2022-2023, où beaucoup de consommateurs avaient vu leur facture d’électricité flamber », a indiqué à une journaliste de l’AFP le ministre de l’Industrie et de l’Énergie Marc Ferracci.