Abu Dhabi va construire un data center géant en France, a annoncé l’Élysée jeudi 6 février, au premier jour d’un sommet mondial sur l’intelligence artificielle (IA) à Paris. Ce data center d’une capacité de calcul pouvant aller jusqu’à un gigawatt fera partie d’un « campus » axé sur l’IA, le plus grand en Europe, selon l’Élysée.
Cela représente « de 30 à 50 milliards d’euros » d’investissements, dans le cadre d’un accord de partenariat signé en présence d’Emmanuel Macron et de son homologue émirati Mohamed ben Zayed Al-Nahyane. Ce campus sera développé par « un consortium de champions franco-émiratis », notamment par le fonds d’investissement MGX, adossé aux Émirats arabes unis. Sa localisation doit encore être décidée.
Selon un communiqué conjoint franco-émirati, « une annonce sur la première tranche d’investissement sera faite lors du Sommet Choose France 2025 », le rendez-vous annuel institué par Emmanuel Macron pour vanter l’attractivité du pays, prévu en mai.
35 sites« prêts à l’emploi »
Il s’agit du premier grand investissement annoncé à l’occasion du sommet sur l’IA prévu jusqu’à mardi à Paris, à l’occasion duquel la France et l’Europe veulent se poser en puissances compétitives face aux États-Unis et à la Chine. La ministre française chargée de l’IA, Clara Chappaz, avait annoncé jeudi matin que 35 sites étaient « prêts à l’emploi » pour accueillir de nouveaux centres de données sur le territoire national. Ils occuperont quelque 1 200 hectares et leur localisation sera dévoilée en début de semaine prochaine.
Le sommet, coprésidé avec l’Inde et qui se tient jusqu’au 11 février, a débuté à l’école d’ingénieurs Polytechnique avec deux journées de tables rondes. Les rencontres se poursuivront samedi et dimanche, consacrées à l’IA dans la culture. Le chef de l’État français donnera une interview à France 2 et au média indien Firstpost dimanche, « dans la foulée du journal de 20 heures ». Avant les échanges diplomatiques lundi et mardi, qui devraient aboutir à « une déclaration de volonté de progrès partagée », selon l’envoyée spéciale du président de la République pour le sommet, Anne Bouverot.
Une centaine de pays annoncés
La participation d’une centaine de pays est annoncée, avec le vice-président américain J.D. Vance, le vice-Premier ministre chinois Zhang Guoqing, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le chancelier allemand Olaf Scholz. L’incertitude persiste quant à la présence d’Elon Musk et de Liang Wenfeng, fondateur de la dernière start-up en vue, la chinoise DeepSeek, avec lequel l’Élysée est en « discussions ». Un « business day » sera aussi organisé mardi à Station F, l’incubateur de start-up fondé par le milliardaire français Xavier Niel, lui-même acteur de la tech.
« L’IA doit passer des laboratoires de recherche aux institutions du monde réel. Pour que l’IA serve vraiment la société, nous avons besoin de liens solides entre le milieu universitaire, l’industrie et l’entrepreneuriat », a plaidé Clara Chappaz.
« La chose la plus importante que je voudrais voir ressortir de ce sommet, c’est s’assurer que les plateformes d’intelligence artificielle qui seront largement utilisées dans le futur seront en source ouverte » (« open source »), a affirmé à l’AFP le Français Yann LeCun, à la tête du laboratoire de recherche en IA de Meta, sur le campus de Polytechnique. Outre sa défense de ces modèles, dont le code est rendu public afin que des chercheurs ou des entrepreneurs s’en saisissent, il s’érige contre la mise en place de « régulations qui viennent ralentir le progrès scientifique ».
Yoshua Bengio, prix Turing 2018, s’est quant à lui déclaré « optimiste » concernant les résultats du sommet. L’objectif « est d’amener les décideurs publics de haut niveau à accorder un peu de leur attention aux discussions sur les côtés bénéfiques et dangereux de l’IA », a-t-il déclaré depuis l’École normale supérieure où il présentait le premier rapport international sur la sécurité de cette technologie.
Mistral AI annonce l’arrivée d’une application
Les équipes de Mistral AI, rival français des géants américains qui a signé un partenariat avec l’AFP, ont profité de l’occasion pour annoncer l’arrivée d’une application de leur outil Le Chat (équivalent de ChatGPT) dans les magasins de Google et Android.
Quant à OpenAI, le créateur de ChatGPT, il permettra à certains clients européens de stocker les données de leurs échanges avec ses agents conversationnels au sein de l’UE, plutôt qu’aux États-Unis ou ailleurs, leur donnant la maîtrise de ces précieuses informations. Enfin, au sujet de l’irruption de DeepSeek et de l’annonce d’un plan de financement de 500 milliards de dollars par les États-Unis pour développer des infrastructures dans l’IA, Anne Bouverot s’est voulue rassurante.