La Serbie renonce aux armes russes mais la rupture avec le Kremlin reste incertaine
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La Serbie a annulé un certain nombre de contrats d’armes avec la Russie, selon les annonces du chef d’état-major général, Milan Mojsilović, sans préciser si le pays allait rompre ses liens avec le Kremlin.

Selon Milan Mojsilović, la décision d’annuler les contrats d’armes avec la Russie se justifie par les sanctions occidentales contre Moscou.

« En ce qui concerne les livraisons d’armes de la Fédération de Russie, c’est actuellement pratiquement impossible », a-t-il confié au Moscow Times.

« Nous essayons de trouver une solution à la situation par la voie diplomatique. Nous avons annulé plusieurs contrats, et certains ont été reportés dans l’espoir que les relations internationales se normalisent », a-t-il ajouté.

Selon le chef d’état-major général de la Serbie, l’armée serbe peut encore acheter des pièces détachées pour les équipements soviétiques et russes, car elles sont produites sous licence dans de nombreux pays du monde. Mais il affirme qu’il n’est plus possible d’acheter de nouveaux équipements à la Russie.

En août dernier, la Serbie a décidé d’abandonner l’achat d’un nouveau lot d’avions de combat russes, un projet en discussion depuis 2021. Au lieu des appareils russes, Belgrade a acheté 12 jets Rafale français pour 2,7 milliards d’euros afin de remplacer sa flotte vieillissante de MiG-29 russes.

Comme l’a reconnu Milan Mojsilović, cette transaction a marqué le début d’une restructuration radicale de l’armée de l’air serbe, car la reconversion des pilotes, la réorganisation de l’infrastructure militaire et d’autres « préparations complexes » seront nécessaires. Le choix des avions de combat français a été fait, selon ses propos, parce qu’ils « fourniront les capacités nécessaires à l’armée de l’air à long terme ».

Euractiv a demandé au Dr Orhan Dragaš, fondateur et directeur de l’Institut de sécurité internationale basé à Belgrade, de commenter les annonces du chef d’état-major général de la Serbie.

Ce dernier confirme le fait que les sanctions occidentales ont rendu impossible l’obtention d’armes et d’autres équipements militaires de la part de la Russie.

« Même le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, n’a pas pu se rendre physiquement à Belgrade, car la Serbie est entourée d’États membres de l’OTAN qui ont refusé à son avion les droits de survol, sans parler d’autoriser le transport de matériel militaire », explique-t-il.

Il s’agit toutefois, selon le Dr Orhan Dragaš, d’un « changement stratégique important pour la Serbie, qui n’est pas temporaire ».

Les achats militaires sont planifiés sur le long terme, et, une fois que ces liens sont rompus, ils ne sont presque jamais renouvelés.

« Avec l’arrêt des livraisons d’armes russes, Moscou a perdu l’un de ses deux principaux leviers d’influence en Serbie et dans les Balkans », souligne-t-il.

Le Dr Orhan Dragaš rappelle que cette évolution intervient alors que la Serbie a pris des mesures pour éliminer la majorité des propriétaires russes de sa compagnie pétrolière nationale, la NIS.

En outre, le pays diversifie son approvisionnement en gaz depuis des années en se tournant vers des fournisseurs de la région caspienne.

La récente décision de la Serbie d’acheter 12 nouveaux avions de chasse français Rafale « en dit long » sur son positionnement stratégique dans le cadre du conflit entre l’Occident et la Russie, souligne le Dr Orhan Dragaš. À cela s’ajoute l’aide militaire substantielle de la Serbie à l’Ukraine, acheminée par l’intermédiaire de pays tiers et évaluée à environ 800 millions de dollars, ce qui dépasse les contributions de certains membres de l’OTAN.

Le Dr Orhan Dragaš soutient également que la réduction progressive de la dépendance de la Serbie à l’égard de la Russie a eu un effet globalement positif.

« Les accords [avec la Russie] ont toujours été très opaques, créant les conditions d’une corruption rampante et d’un flux de fonds étranges substantiels vers les agents d’influence russes en Serbie et dans la région », abonde-t-il.

« Par conséquent, l’arrêt du commerce militaire et la réduction de la dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie réduisent directement les voies par lesquelles Moscou finance et soutient les forces pro-russes et anti-européennes en Serbie et dans la région », conclut-il.

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