
Mon fils, ma bataille. Un doux euphémisme pour Marvin, perpignanais de 50 ans, qui témoigne sous prénom d’emprunt de son incroyable combat de papa célibataire. Son épouse, mère de leur garçon de 8 ans à l’époque, les a abandonnés une nuit de 2020. Sans un mot.
Marvin a vécu la triste expérience d’un conjoint, son ex-épouse en l’occurrence, qui sort acheter le pain et disparaît à jamais. Ou presque. Ancien militaire dans les commandos parachutistes de Fréjus, puis chef d’entreprise dans les fruits et légumes, le Guadeloupéen de naissance avait pensé avoir trouvé la femme de sa vie. Le couple se marie et a un bébé. Après 11 années d’union sans nuage, Ryan est alors âgé de 8 ans, “et moi, je travaillais de 3 à 20 heures pour gagner entre 4 000 et 5 000 € par mois et leur offrir une vie de princesse et de petit prince”. Or, une nuit, dit-t-il, sa femme s’en va. Au réveil, Marvin la cherche partout. Elle est partie sans son petit. “Ryan était tout pour moi mais le mariage, c’était sacré, c’était ma famille.”
Il affirme découvrir au fil des heures qu’elle a emporté tous les bijoux, les objets et vêtements de valeur. Le compte en banque est vide et il découvre le trousseau de clés de la maison dans la boîte aux lettres. “Je ne comprenais pas mais tout ce qui m’importait, c’était mon fils.” Soucieux de ne pas le dépayser, Marvin reste à Marseille où Ryan a ses copains, son école. Le papa se force à ne pas sombrer, essaie de retrouver du travail.
Une ou deux fois, la mère appelle pour récupérer Ryan et l’emmener en vacances. Mais, “elle ne vient jamais le chercher”. Le quinquagénaire enchaîne les déboires, prend rendez-vous chez un psychologue pour son gamin déstabilisé.
Puis, il décide de déménager et s’installe avec lui à Perpignan en juillet 2024. Il perçoit 845 € mensuels, RSA compris, ne connaît personne. La galère. “Ryan avait grandi, j’ai pris un job, on a trouvé un logement HLM, je le protège au maximum.” Aujourd’hui, adolescent de 14 ans est devenu “un jeune bien habillé, bien coiffé, bien parfumé”, le décrit fièrement Marvin. Plutôt solitaire, “il ne veut plus parler à sa mère. Quand elle s’est permis de le joindre en septembre dernier, il m’a demandé s’il pouvait bloquer son numéro.” Intelligent et doué, il a 17,5 de moyenne générale dans son collège de Perpignan, Ryan manque toutefois de confiance en lui. “Il me colle en permanence. Au fond de lui, je crois qu’il a une peur ancrée de l’abandon, je le rassure de tout mon cœur. Je le taquine sur ses futures petites copines, je le branche sur les métiers de la robotique, de l’Intelligence Artificielle, c’est l’avenir. Je me bats pour son bonheur.”
Pour remettre bon ordre dans l’esprit de son fils, Marvin a décidé de saisir le tribunal, afin que la garde parentale lui soit officiellement confiée noir sur blanc. “Je sais que les pères célibataires ont plus de difficultés que les mères à avoir de l’aide et gain de cause. Mais, enfin, dans mon cas, et même si je viens de perdre mon emploi, Ryan ne manque de rien”, assume le papa solo. Au-delà d’un profond ressenti de discrimination envers les hommes dans sa situation, Marvin ne se démonte jamais. Il envoie des CV partout, se met en quête d’un poste tous les matins, attend ses droits au chômage bloqués par un mandataire liquidateur qui n’a toujours pas envoyé sa fiche de paie deux mois après un licenciement économique… “Heureusement, j’ai deux, trois vrais amis qui me soutiennent, et ma sœur de Paris. Je jongle avec ma carte bancaire débitée en fin de mois, ce n’est pas évident mais je n’ai pas le choix”, déplore-t-il. Impatient de monter ici sa propre petite entreprise d’écrivain public et de conseil en démarches administratives. “Je m’y connais bien, je peux aider les gens, je vais rebondir.” Son seul espoir immédiat, pouvoir offrir une paire de Nike neuves à Rayan.