Trois ans de sécheresse, une pression médiatique constante invitant l‘ensemble de la société à faire des économies d‘eau… L‘actualité des Pyrénées-Orientales, département qui compte plus de 27.000 piscines individuelles, n’était guère porteuse pour le marché de la piscine individuelle. Et les ventes s‘en ressentent : « Avec les restrictions, les clients sont plus attentistes, ils prennent le temps pour voir si les contraintes sont levées, nous avons perdu peut-être 20 % d‘activité en deux ans », témoigne Marc Villepontoux, patron d‘une entreprise de maçonnerie artisanale à Argelès-sur-Mer, qui construit de douze à quinze piscines par an.
En plus de se rétrécir, le marché et la demande ont aussi grandement évolué.
« Avant la crise, nos plus grosses ventes portaient sur des bassins de sept mètres par trois, mais aujourd‘hui, ce qu‘on vend le plus, ce sont des bassins de 4,3 mètres par 2,3 mètres, parce que cela réduit le volume d‘eau par deux », explique, pour sa part, José-Alexandre Muñoz, gérant d‘Aloi Piscine également à Argelès-sur-Mer.
Une réduction qui peu aussi passer par la profondeur, comme le constate Marc Villpontoux : « Nous ne construisons plus les mêmes piscines qu‘avant : nous expliquons à nos clients comment être plus économes. Au lieu de 1,50 ou 1,60 mètre, on propose 1,35 mètre de profondeur, parce que c‘est suffisant pour avoir un bassin agréable pour un usage familial ».
Le souci d’économie
La Fédération des Professionnels de la Piscine et du Spa annonçait l’existence de plus de 3,5 millions de piscines privées en 2023 sur le sol français, soit 123.557 de plus qu’en 2022. Selon le calculateur de la fédération, qui préconise de ne jamais vider un bassin, même partiellement, ces équipements ne représenteraient « que 0,06 % de la consommation d’eau nationale, soit environ 20,8 millions de m3 d’eau sur l’année ».
Mais le marché s’est heurté à un contexte particulièrement morose, la confiance des ménages tombant à un niveau historiquement bas à la suite du déclenchement de la guerre en Ukraine et peinant à remonter, notamment en raison des craintes liées à la baisse du pouvoir d’achat. L’activité négoce (produits rattachés à la piscine), quant à elle, avait vu son chiffre d’affaires national baisser de 13 % en 2023, restant toutefois supérieur de 42 % à 2019.
Les deux professionnels catalans de la piscine s‘entendent pour dire que la vraie nouveauté, c‘est le souci d’économie. Marc Villpontoux détaille : « Soit les clients nous interrogent sur le sujet, soit nous les mettons au courant, et les éléments qui permettent de faire des économies sont aujourd‘hui intégrés dès le début du projet ». En l’occurrence, des bâches à bulles ou des volets roulants qui permettent de largement réduire l’évaporation, jusqu‘aux systèmes de contrôles de température, afin de ne pas voir le niveau de la piscine baisser et d’être dans l‘impossibilité, restrictions obligent, de « refaire le niveau ».
Le gérant d‘Aloi Piscine indique « vendre des piscines plus petites mais bien mieux équipées que par le passé ». Une montée en gamme qui lui a permis, peu ou prou, de maintenir son chiffre d‘affaires en dépit du recul d‘activité.
« L’export » de proximité
Si le marché a changé de nature et s‘est réduit, il a contraint les entreprises à faire bouger leurs propres lignes.
« Nous avons pu compenser une partie de la baisse d‘activité par le développement des services d‘entretien et de réparation, ajoute José-Alexandre Muñoz. Nous répondons à une demande très importante de recherches de fuites et de rénovation, un marché sur lequel nous n’étions pas forcément positionnés jusqu‘ici. »
Marc Villepontoux a lui fait le choix de « l‘export » de proximité : « Nous sommes sortis du département des Pyrénées-Orientales pour aller dans des départements sans restrictions. Cette année nous construisons une piscine à Grimaud dans le Var et une autre à Saint-Tropez dans les Alpes-Maritimes ».
Les clients, ont-ils changé ? Oui, assurent les deux entrepreneurs, qui les disent sensibles aux économies : « Les clients ont désormais une réflexion globale qui peut aller jusqu’à inclure du photovoltaïque dans le projet de piscine pour limiter aussi la consommation d’énergie », rapporte José-Alexandre Muñoz. À voir si ces évolutions dureront dans le temps.