
Ciblé par plusieurs représentants politiques, l’Office français de la biodiversité (OFB) appelle à une grève nationale, vendredi 31 janvier 2025. Relation avec les agriculteurs, port d’arme : un inspecteur de l’environnement donne à voir son métier sous un meilleur jour.
Pourquoi la police de l’environnement est armée ? Les contrôles de l’Office français biodiversité (OFB) sur les exploitations agricoles sont-ils fréquents et humiliants, comme le premier ministre l’a laissé entendre ?
Critiqués par certains élus, les inspecteurs de l’environnement ont déposé un préavis de grève pour la journée du 31 janvier. En Haute-Saône, ils ont déjà mis fin à leur mission de terrain. Sollicité, un délégué syndical régional a voulu rappeler la diversité et l’importance des missions de l’OFB.
La diatribe de François Bayrou n’est pas digérée. “Quand les inspecteurs de la biodiversité viennent inspecter le fossé ou le point d’eau avec une arme à la ceinture, dans une ferme déjà mise à cran par la crise, c’est une humiliation et c’est donc une faute” a déclaré le premier ministre dans son discours de politique générale, le 14 janvier. Ce tacle a ouvert la voie à d’autres au sein de la droite, puisque les députés Laurent Wauquiez et Eric Ciotti sont allés jusqu’à réclamer la suppression de l’OFB par la suite.
L’UDR supprimera les ARS, dont la bureaucratie entrave la gestion de la santé, l’ADEME, qui impose des normes excessives aux entreprises, l’OFB, qui accable les agriculteurs, ou encore l’ARCOM, qui interfère avec la liberté des médias !#Grandforumdeslibertes pic.twitter.com/2UBhDK3nAH
— Eric Ciotti (@eciotti) January 21, 2025
“Humiliation”, “faute” : “les mots sont forts” au goût de Benoît Solonel. Délégué UNSA écologie, un des syndicats de l’OFB, il estime son organisation “jetée en pâture par le gouvernement”.
“C’est du même ordre que si les dealers demandaient aux policiers de ne plus venir dans les cités”, a osé un autre agent de l’OFB, sur les ondes de France Inter au lendemain du discours de François Bayrou. Ni une ni deux, l’analogie entre dealers et agriculteurs a enragé le syndicat agricole de la Coordination rurale, dont les représentants sont allés dégrader plusieurs locaux de l’OFB en France.
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De l’amidon a été déversé sur le bâtiment de Noidans-lès-Vesoul en Haute-Saône, dans la cheminée notamment, le 23 janvier dernier. Privés de chauffage, les inspecteurs de l’OFB ne peuvent plus occuper leurs locaux. Benoît Solonel rappelle pour autant que son intersyndicale est en grève contre le gouvernement et non contre les agriculteurs. Son propos : ne pas ramener tous les exploitants sous la bannière de certains syndicats et rappeler que “sur le terrain, la majorité des interventions de l’OFB se passent bien”.
La coordination rurale d’Occitanie s’en est pris aux locaux de l’OFB, à Toulouse.
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© Laurent Dard – MAXPPP
Il contredit d’abord l’idée reçue selon laquelle les agriculteurs sont contrôlés à outrance. Les missions de contrôle sur des exploitations représenteraient, selon lui, deux à trois journées de travail par an en Haute-Saône. Les interventions qui peuvent en revanche générer des tensions sont les constatations d’infraction – quand un inspecteur de l’environnement cherche à déterminer la cause d’une haie arrachée ou d’une rivière et à sanctionner le responsable, par exemple.
“Il n’est jamais agréable d’avoir affaire à un contrôle policier quand on est auteur d’infraction”, s’explique Benoît Solonel, qui tient à préciser que “les dossiers aboutissent rarement sur des condamnations judiciaires, mais plutôt sur des alternatives aux peines”.
Les locaux de l’OFB de Haute-Saône sont fermés, ce 29 janvier 2025, une semaine après avoir été dégradés.
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© Florence Petit – France Télévisions
Tous les agriculteurs ne partagent pas cette opinion. Sur les réseaux sociaux, certains témoignages, notamment celui-ci, récupéré par Laurent Wauquiez, racontent des contrôles, des convocations et des amendes de l’OFB mal vécues par les exploitants.
« J’ai été convoqué par la gendarmerie et au tribunal, mis contre un mur, pris en photo comme un délinquant et j’ai dû payer une amende après un contrôle de l’OFB parce que j’avais fait l’entretien d’un fossé sur mon exploitation. »
Ce témoignage de Laurent, éleveur d’Idéale, la… pic.twitter.com/WwJ1TkqiUM— Laurent Wauquiez (@laurentwauquiez) January 29, 2024
“Il ne faut pas opposer agriculture et biodiversité et poursuivre le dialogue avec les exploitants”, tente de résumer Benoit Solonel. Dans cette optique, l’OFB de Haute-Saône a participé à l’ouverture d’un guichet unique sur la préservation des haies. Une plateforme en ligne “pour répondre à la demande des agriculteurs compte tenu de la complexité de la réglementation”, développe le syndicaliste.
Concernant le port d’armes, lui et son syndicat estiment que les Glock 17 portés par les agents de l’OFB sont nécessaires dans le cadre de certaines missions, notamment celles de lutte contre le braconnage. “85 agents de l’OFB et de ses organes ancêtres ont été tués dans l’exercice de leur fonction, dont 15 par armes à feux”, rappelle, enfin, Benoît Solonel.
Son intersyndicale espère obtenir le rétropédalage et le soutien du gouvernement, ainsi que des moyens préventifs pour protéger les agents de l’OFB à l’avenir.
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