La guerre commerciale tant redoutée entre les États-Unis et ses partenaires internationaux a donc officiellement éclaté en fin de semaine dernière. Les premières manœuvres ont eu lieu, faites de beaucoup d’annonces tonitruantes et de quelques retraites stratégiques. Au bout d’une semaine, voici les nouvelles du front de la guerre commerciale.
La Chine : une riposte rapide
Dès mardi, les États-Unis ont imposé une augmentation de 10 % des droits de douane sur l’ensemble des produits importés de Chine. Cette décision a provoqué une réaction immédiate de Pékin, qui a répliqué avec des droits de douane de 15 % sur le charbon et le gaz naturel liquéfié, ainsi que de 10 % sur le pétrole, les machines agricoles et les véhicules.
Les analystes de Goldman Sachs notent que « les mesures de rétorsion chinoises sont proportionnellement moins élevées ». Les nouvelles taxes imposées par la Chine concernent en effet environ 14 milliards de dollars de biens américains, tandis que les droits de douane américains touchent 525 milliards de dollars de produits chinois. Cette escalade marque le début d’un jeu complexe de négociations, où Trump évoque déjà un appel imminent avec Xi Jinping, tout en affirmant qu’il n’est « pas pressé » de discuter.
Mexique et Canada : la menace puis la conciliation
À l’opposé, le Mexique et le Canada adoptent une stratégie plus conciliatrice. Les sanctions américaines, telles que les 25 % de droits de douane, ont été suspendues, avec une réévaluation prévue dans un mois. Les deux nations ont convenu d’engagements mutuels concernant la lutte contre le trafic de drogue et l’immigration illégale, prétexte avancé par le président des États-Unis pour déclencher les hostilités.
Le Canada, déjà ciblé lors du précédent mandat de Trump, a décidé de ne pas interdire les entreprises américaines des contrats publics. Cette démarche témoigne d’une volonté de maintenir des relations commerciales solides, malgré les menaces pesant sur l’économie.
L’Europe : la drôle de guerre
L’Europe, quant à elle, se trouve également dans la ligne de mire de Trump. Le président américain a promis une décision « très bientôt », et Bruxelles s’active pour élaborer des scénarios afin de se préparer à un éventuel conflit commercial. Les secteurs de l’automobile, des machines et de la métallurgie sont particulièrement exposés à d’éventuels droits de douane.
Goldman Sachs estime que « 40 % des exportations européennes vers les États-Unis pourraient être soumises à des droits de douane », ce qui pourrait représenter 1 % du PIB européen. Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a averti que « nous serons prêts pour des négociations difficiles si nécessaire », appelant à « prendre des décisions en dehors de toute émotion ou nostalgie pour un monde révolu ».
Pour les entreprises, l’incertitude
Les entreprises commencent déjà à ressentir les effets des nouvelles taxes douanières. Par exemple, Mattel a signalé qu’il pourrait être contraint d’augmenter ses prix en raison de l’importation de composants chinois. De plus, les sociétés étrangères exportant vers les États-Unis doivent envisager de relocaliser leurs usines, en particulier dans le secteur automobile, où les sites au Mexique pourraient être affectés.
Cette incertitude croissante pèse sur les décisions stratégiques des entreprises, créant un cercle vicieux où même l’absence de droits de douane nuit aux investissements. Ana Boata, économiste chez Allianz Trade, a noté que « c’est un cercle vicieux qui s’installe : même si les droits de douane ne sont pas mis en place, il y a une perte de potentiel », puisque les « entreprises n’investissent pas » en cas d’incertitudes.
La mondialisation remise en question ?
La montée du protectionnisme et la préférence pour les négociations bilatérales relancent le débat sur les limites de la mondialisation, déjà fragilisée par la pandémie et la guerre en Ukraine. À l’Organisation mondiale du commerce, le mécanisme censé résoudre les différends de manière pacifique est paralysé depuis des années, largement à cause des États-Unis.
Malgré ces tensions, Pascal Lamy, ancien directeur de l’OMC, rassure en affirmant que « le commerce international mesuré en volume continue à croître ». La mondialisation subit une transformation, mais ne régresse pas, indiquant que « le plus faible doit négocier en réaction ou proactivement », selon Ana Boata.